lundi 4 mai 2020

Covid 19 : mauvais bilan sanitaire pour les EHPAD de Fontainebleau

L’EHPAD (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) héberge des personnes âgées, à temps complet ou partiel et à titre permanent ou temporaire. Il propose et assure un service de soins médicaux et paramédicaux adaptés, des actions de prévention et d’éducation à la santé et apporte une aide à la vie quotidienne adaptée (Code de l’action sociale et des familles - Article D312-155-0).

Les résidents font donc selon les termes même de la réglementation d’une surveillance médicale. C’est pour cela que les résidents des EHPAD sont testés plus largement que la population.
Au plan national (au 2 mai 2020), sur environ 728 000 résidents en EHPAD, on compte 70 767 cas (9,72 %) et 9312 décès (1,28 %).

Toujours selon les bonnes sources décrites dans mon billet précédent, je suis en mesure de communiquer un bilan un peu inquiétant sur les EHPAD de Fontainebleau.

Près de la moitié des résidents contaminés
Il y a actuellement 96 résidents contaminés sur 196, soit 49 %.

12 morts
Toujours sur 196, on dénombre 12 morts liés directement au COVID-19, soit un taux de mortalité de 6,12 %.

2 agents sur 5, contaminés
Les agents sont largement contaminés, 38 sur 99, soit 38.3 %.



En guise de réflexions

Les taux de contamination et de décès des établissements de Fontainebleau sont très supérieurs aux moyennes nationales, il conviendra d’en tirer les conséquences.

Le confinement des résidents a donc été une mesure insuffisante, puisque, des résidents aux agents, la contamination est très importante.

Il est évident que le personnel, qui paye un lourd tribut par son dévouement, et on le voit par un taux de contamination très élevé, n’est nullement à blâmer, mais c’est la déficience de l’organisation sanitaire, pas seulement locale (on fait avec les locaux que l’on a), mais aussi le manque de moyens et de matériel de protection, et cela, c’est un problème national. Il est très difficile de protéger des résidents sans ce matériel, alors que l’on doit avoir des contacts réguliers et physiques avec eux.

Encore fois, il semble que l’impréparation du pays et l’insuffisance des mesures a fait payer un prix élevé à nos concitoyens qui avaient le droit de vivre encore dans la dignité. Les chiffres locaux montrent aussi une prévalence supérieure au reste de la France, ce qui mérite une enquête sur les causes et les remèdes.

Ma dernière pensée va aux malades, aux victimes, et à leurs familles : aux vivants, il faudra du courage, mais aussi de l’engagement pour que cela ne se reproduise plus.

vendredi 1 mai 2020

Covid 19 : Y a-t-il eu un tri dans les EHPAD du Sud 77 ?

Médiatisée au plan national par le Canard Enchainé (22 et 29 avril 2020), la recommandation du 19 mars 2020 de l’Agence régionale de santé, sur la Décision d’admission des patients en unités de réanimation et unités de soins critiques dans un contexte d’épidémie à Covid-19 a-t-elle entraîné un refus de transférer nos aînés des EHPAD vers les services de réanimation ?

L'article du Canard Enchainé du 29 avril 2020 : des conclusions inquiétantes...



Cette recommandation indique : « Dans un contexte d’exception où les ressources humaines, thérapeutiques et matérielles pourraient être ou devenir immédiatement limitées, il est possible que les praticiens sur-sollicités dans la durée soient amenés à faire des choix difficiles et des priorisations dans l’urgence concernant l’accès à la réanimation. »

De manière plus violente, il est écrit : « Ce processus décisionnel concerne au mieux (cf. algorithme) : [ … ] 3. La nature de la décision elle-même, pouvant être : a. Une non-admission en soins critiques :
[ … ] Soit parce que l’admission en soins critiques relèverait d’une obstination déraisonnable, définie par des thérapeutiques ne bénéficiant pas au patient, disproportionnées par rapport au bénéfice attendu, qui n’auraient d’autre but qu’un maintien artificiel — et transitoire — de la vie au prix de souffrance pour le patient et ses proches, et d’une détresse des équipes. Une telle admission risquerait aussi de priver un autre patient d’une prise en charge en réanimation, alors qu’elle/il aurait plus de chance d’en bénéficier. Ainsi, nous considérons licite de ne pas admettre un patient en réanimation dès lors qu’il s’agit d’une obstination déraisonnable, y compris si une place de réanimation est disponible. »

La possibilité de ne pas prendre en charge des personnes en EHPAD est clairement ouverte. Beaucoup ont été traitées sur place.

Une recommandation contestable : le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) a publié une prise de position sur les « Décisions médicales dans un contexte de crise sanitaire et d’exception » le 06 avril 2020. Pour l’Ordre, la question de la priorisation entre les patients « ne saurait être retenue qu’en l’absence avérée de toute autre possibilité et s’il est constaté qu’aucune autre alternative ne se présente au terme d’une appréciation collégiale tracée dans le dossier, fondée sur l’état du patient, prenant en compte notamment ses comorbidités. L’âge du patient, sa situation sociale, son origine, une maladie mentale, un handicap ou tout autre facteur discriminant ne peuvent être l’élément à retenir ».

En particulier, dans la prise de position de l’Ordre du 6 avril 2020, on peut lire encore : « Tous les patients atteints du covid-19, dont ceux résidant en EHPAD et autres établissements d’accueil de personnes vulnérables, doivent bénéficier du même accès aux soins et de la même qualité de prise en charge que les autres patients. S’ils présentent des formes sévères ou graves, leur prise en charge dans les établissements de santé adaptés doit être assurée même dans un contexte marqué par la limitation des ressources ».

Passant du régional au local, la question de l’application de cette recommandation se pose en ce qui concerne nos EHPAD et notre hôpital (avec ses trois établissements).

Des statistiques tirées des meilleures sources (le Facebook personnel de M. Valletoux qui donne des informations qui devraient être rendues publiques par les institutions et que l’on ne trouve pas forcément sur celui de la mairie et encore moins de l’hôpital) permettent de déterminer qu’il n’y a jamais eu saturation des lits de réanimation au sein des trois établissements du Centre hospitalier du Sud 77 (en admettant que leurs équipements et que le personnel eussent été suffisants), mais la peur de cette saturation aurait pu entraîner des choix (il y a eu une tension du 26 mars au 2 avril). Une hypothèse à vérifier évidemment et nous espérons qu'elle a bien été écartée.


Dans la mesure où nous n’avons pas d’éléments sur le plan local, la question doit être publiquement posée : cette recommandation a-t-elle été suivie en ce qui concerne les patients dans les EHPAD du Sud 77 ?

Les quelques éléments sur la mortalité dans les EHPAD nous paraissent très parcellaires et méritent une enquête statistique.

Nous souhaitons clairement et sans ambiguïté qu’il n’en eu rien été. Si au contraire, les autorités devaient porter une responsabilité, nous demandons qu’il en soit tiré des conséquences pour éviter que plus âgées et dans un EHPAD, elles ne se retrouvent elles-mêmes dans ces dramatiques circonstances.


Annexe : fac-similé de la recommandation